samedi 28 août 2010

A peine quelques autres hommes (de ma vie)

C'était irrémédiable et il aurait été plus sage de l'admettre mais, pendant tout un temps, malgré tout, je me suis obstinée à inventer ce grand frère dont mes parents ne m'avaient pas dotée. 

Celui-là, que j'avais désigné sans le consulter -ni lui ni personne- n'avait aucune caractéristique physique commune avec nous mais il était plus âgé que la plus aînée de mes soeurs, ce qui rendait cohérente à mes yeux notre fratrie fictive. 
Nous discutions à l'issue de nos parcours, sur les terrains de course d'orientation et à l'égard de la revêche adolescente que j'étais, il manifestait sans doute davantage de patience que n'en aurait montré un frère véritable. 
Par la suite, ni la vie ni les courses d'orientation ne nous firent nous croiser à nouveau. Et je me satisfis presque d'être la dernière née d'une brève série de filles. 
Jusqu'au jour où j'emménageai dans sa ville. Et, même, à trois cents mètres de chez lui, si j'en croyais une sonnette aperçue par hasard, rue Lamartine, qui portait son nom. 

Un soir, j'allai m'en assurer. 

Mais ce n'était pas lui.
Je pourrais citer Olivier, aussi,
qui signait "ton grand frère"
et resta toujours 
un mystère. 
(Mais dans les vraies familles,
ça arrive également 
d'être étonné par les gens.)

Et puis il y a cet homme-là.
Cet homme dont j'ai refusé d'être l'âme soeur
car je ne voulais pas qu'il soit mon frère, lui. 
Cet homme-là qui me dit 
que la nuit
il rêve qu'il écrit
de la poésie.

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