samedi 2 octobre 2010

Retour à Shirokanedai

C'était souvent le vendredi soir et je prenais la Yamanote jusqu'à Meguro. Je traversais la galerie d'Atre, je longeais les vitrines de choux à la crème, de tartes aux fruits, de doghnuts colorés, je passais outre les parfums écoeurants. Parfois, j'achetais un mochi aux azukis, translucide, doux, frais, fariné. Et quand je mordais dedans, il me venait à l'esprit l'adjectif "confortable". 
Selon la saison, la nuit était au bord de tomber ou déjà acquise. 
Je rajustais mon écharpe ou je remisais dans mon sac les manches auxquelles la climatisation du train m'avait obligée. 
Les cigales saturaient l'été de leurs conversations assourdissantes ou alors c'était les grillons d'automne mais rarement les moteurs des voitures avaient raison des chants qui s'échappaient du jardin historique. 
Passée la bouche de métro de Shirokanedai, j'allongeais le pas. 
Malgré mes prévisions, mes belles résolutions, je n'étais jamais assez en avance pour descendre fouiller au sous-sol du book-off. Je me contentais d'envier les lecteurs attablés au café même si je savais parfaitement que leur thé ne valait rien, qu'ils mangeaient des sandwichs élastiques ou des muffins industriels, qu'été comme hiver, il ne faisait jamais assez chaud et que le rock américain gênait la concentration. 
Et puis non, je ne les enviais pas : moi, on m'attendait. 
Dans la petite rue à gauche, il m'arrivait de croiser des bandes uniformes et joyeusement bruyantes du collège de filles voisin. 
Puis, au premier étage, la voix fluette du petit garçon blond disait : "bonjour Gwen" et je me sentais arrivée, accueillie. 

Prendre le Thalys, ce WE, c'est un peu remonter dans la Yamanote, remonter le temps. 

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